UTMB 2025 : récit d’une course épique

Ce vendredi 29 août 2025 je prenais enfin le départ de l’UTMB !
Je vous raconte ma course dans ce nouvel article.

Nous arrivons sur place environ 1h30 avant le départ.
(Je suis au départ avec 3 amis : Thibaut, Adrien et Claude).
La place du triangle de l’amitié est déjà bondée.
Quelques minutes avant le départ, c’est la présentation des élites.
Courtney Dauwalter, François d’Haene et Ludo Pommeret gagnent à l’applaudimètre.
17h42 : les premières notes de Vangelis retentissent.
On est dans l’ambiance, la foule est impressionnante.

Chamonix – Les contamines : En plein bourre malgré la pluie

     

17h45 : le départ est donné en douceur.
Je suis concentré pour ne pas tomber dans la masse de coureurs.
Mais je ne peux pas m’empêcher de regarder la foule le long du parcours.
C’est impressionnant.
La pluie fait rapidement son apparition.
C’est même une grosse averse qui s’abat sur nous.
Dur !

Je suis bien obligé de déjà sortir la veste de pluie.
Cette pluie va nous accompagner jusqu’aux Houches où nous sommes déjà bien trempés.
Puis ça se calme pour la montée au col de Voze, première difficulté du jour.
Les sensations sont très bonnes.
Les encouragements ne faiblissent pas, surtout pour Claude qui est avec moi.

Une fois cette première difficulté vaincue, c’est la descente sur Saint Gervais.
La pluie l’a rendu glissante et boueuse.
Une petite erreur d’inattention… et c’est la petite chute sans gravité !
Je me reconcentre et décide d’allumer la frontale car il commence à faire sombre dans les bois.

20h45 : c’est l’arrivée à Saint Gervais ! Les encouragements sont toujours aussi impressionnants, ça me galvanise.
Je suis bien dans ma course, moi qui avais peur de mettre du temps à « rentrer dedans ».

La dizaine de kilomètres qui relient Saint Gervais aux Contamines sont assez roulants.
Je double pas mal de monde.
Je m’alimente régulièrement.

Ma mère m’attend aux Contamines pour l’assistance.
C’est assez chaotique car il y a peu de place et beaucoup de monde.
Mais je prends le temps car je sais que la suite va être rude avec les conditions (spoil : ce sera même encore pire que ce que je pensais).

Je m’équipe pour affronter la nuit : manches longues, pantalon de pluie, bonnet et gants à proximité.
C’est parti pour affronter des conditions qui vont s’avérer hivernales !

Les contamines – Courmayeur : conditions dantesques et petits tracas


Je repars à grande foulée jusqu’à Notre Dame de la Gorge.
J’ai une douleur sous le pied gauche qui me gêne un peu.
Il va falloir tenir jusqu’à Courmayeur pour changer de chaussures.
C’est le début de la longue ascension vers le col du bonhomme puis le refuge de la croix du bonhomme qui culmine à 2449 m.

Derniers encouragements au début de la montée sur la voie romaine puis ça y est : nous retrouvons le calme des montagnes.
Une petite pluie nous accompagne.
Au col de la Balme, on nous annonce la couleur : les coureurs qui n’ont pas leur pantalon de pluie doivent s’arrêter pour le mettre.
On nous annonce également un parcours de repli après le col de la Seigne.
Je comprends donc qu’on va zapper les pyramides calcaires.

Nous continuons de grimper vers le col du bonhomme.
Peu à peu la pluie se transforme en neige.
Le sol devient tout blanc, c’est magnifique !
Je mets rapidement mon bonnet pour me protéger du froid : je ne le quitterai plus jusqu’aux Chapieux !
Mais je découvre rapidement le point faible de mon équipement : les gants.
Ils ne sont pas si imperméables.
Je regrette de ne pas avoir pris de 2e paire.
Je commence à avoir les mains gelés.
Pas le choix : je décide de ranger les bâtons, d’enlever mes gants trempés et de mettre les mains sous le pantalon de pluie !
Et ça fonctionne plutôt bien.

Au col du bonhomme, je constate que le froid a déjà fait du dégât.
Plusieurs personnes sont revêtus de leur couverture de survie en sous-couche et marchent avec.
La liaison entre le col du bonhomme et la croix du bonhomme est courte mais assez pénible.
J’ai un peu froid : il faut avancer sans s’arrêter.
Une fois arrivé au refuge, la descente nous fera regagner en température rapidement.

ça y est nous sommes enfin au refuge vers 1h30 !
L’organisation propose à ceux qui veulent d’aller se réchauffer dans le refuge.
Plusieurs personnes saisissent l’opportunité.
De mon côté, je choisis de continuer mon chemin.

Cette descente, je la connais bien… mais de jour et par terrain sec.
Mais là, elle va s’avérer chaotique pour moi.

Le terrain est très très boueux et il faut y aller doucement.
Ma frontale montre des signes de dysfonctionnement.
En tentant de la régler, je chute une première fois.
J’ai de la boue partout, ça c’est fait !
Le plus pénible c’est sur les mains qui en plus sont toujours un peu froides.

Je m’arrête dans des ruisseaux pour me rincer les mains.
Mes mains sont si froides que l’eau froide semble les réchauffer !

Je m’efforce de ralentir pour la suite.
Mais la frontale continue de déconner.
2e chute dans la boue !

Je commence à m’énerver et je prends le temps de m’arrêter pour régler ça. Je rattrape un gars qui chute juste devant moi… ce qui me fait chuter aussi.
C’est Claude ! Du coup, on en rigole.

Au bout de plus de 45 minutes de descente, me voici enfin aux Chapieux à 2h15 du mat’.
Malgré la descente chaotique, je me sens plutôt bien.
Mais des frottements sur l’intérieur des cuisses me gênent.
Je me dis naïvement que ça va passer.
Je priorise de manger convenablement et de ne pas trop trainer pour ne pas me refroidir.
Crozet, beaufort, gauffre : ça fait du bien !
Mais avec le recul, je pense que j’aurais dû charger encore plus vue la dépense calorique de la nuit.

Nous repartons avec Claude.
Je claque des dents, comme quoi il ne fallait pas s’arrêter trop longtemps.
Nous relançons pour se réchauffer.
La douleur sous le pied gauche revient mais c’est supportable.
Il est temps d’affronter le 2e col enneigé : le col de la Seigne qui va nous emmener en Italie !

Les petits ennuis continuent.
J’ai du mal à enclencher mes gantelets sur mes bâtons.
Je force un peu trop et…crac je déchire un gantelet.
Tant pis, on verra à Courmayeur.

Je ressens mon premier coup de mou dans la 2e partie de la montée.
La neige fait à nouveau son apparition.
Il fait froid.
J’avance péniblement mais me voilà en Italie à 4h45 !

La suite jusqu’au lac Combal est normalement roulante.
Mais le terrain humide va encore rendre cette partie glissante et pénible.
Pour couronner le tout, les soucis commence à s’accumuler :

  • le coup de mou est toujours là : je ralentis pour m’alimenter
  • mon pantalon de pluie semble s’être détendu (suite aux chutes). Je dois le remonter toutes les minutes !
    Je finis par trouver la solution : me le remonter au niveau du nombril et le passer au-dessus de la veste de pluie.
    Un joli style, heureusement qu’il n’y a pas de photo pour immortaliser ça !
  • les frottements à l’intérieur des cuisses s’intensifient : pas le temps de m’arrêter, je gèrerai plus tard
  • la frontale s’est mise en mode économie : je ne vois pas grand chose mais je préfère garder l’autre frontale pleine pour la 2e nuit

La pluie est toujours là au lac Combal à 5h30.
Je prie pour un beau lever de soleil pour la montée au Mont-Favre !

Mon voeu va être exaucé ! C’en est fini de la pluie sur cet UTMB 2025 !

J’apprécie à peine le lever du jour sur le Mont Blanc car je suis dans le mal sur cette courte montée de 450 d+.
Mais Courmayeur n’est pas loin.
Je vais retrouver ma femme.
Je vais enfin pouvoir enlever ce put*** d’équipement plein de boue et changer de chaussures.
Alors je m’accroche en me disant que ça va passer.

7h30 : ravitaillement au refuge de Checrouit. Plus que la descente vers Courmayeur !
Je m’occupe enfin des frottements en me tartinant de Nok sur les cuisses.
Un autre coureur profite de l’aubaine !

La descente sur Courmayeur est assez corsée mais le terrain est sec.
Je suis mieux.
J’arrive à Courmayeur à 8h15.

Je profite de l’assistance de ma femme pour me changer et me nettoyer.
ça fait du bien !
Je découvre l’état de mes pieds après plusieurs heures dans l’humidité.
Pas d’ampoule mais c’est pas très très joli !
Je tartine les pieds de Nok.
Je passe aux Ultra Glide 3 pour la prochaine partie en espérant que ça règlera mes douleurs sous le pied.
Je mange un peu (mais pas suffisamment, vous allez vite le constater).
Je passe à la vaseline pour essayer de régler mes problèmes de frottement.
Ma femme m’aide à recoller mon gantelet avec de la bande adhésive (ça tiendra jusqu’à l’arrivée !).

Je me sens un peu fatigué mais je me dis que ça va aller.
C’est parti pour la suite des aventures !

Courmayeur – Grand Col Ferret : la souffrance

Très vite, je déchante en partant de Courmayeur.
La seule bonne nouvelle c’est que je n’ai plus mal sous le pied gauche suite au changement de chaussures.
Pour le reste :

  • chaque pas me procure une sensation de brûlure sur l’intérieur des cuisses. La perspective de devoir supporter ça jusqu’à l’arrivée m’effraie. Cela me semble inhumain ! Le moral en prend un coup.
  • je commence à avoir envie de dormir et je manque de force dès le début de la montée à Bertone.

Malgré cela, je continue ma route plein d’incertitudes.
La montée au refuge Bertone (800d+) me paraît si longue.
Je double péniblement les randonneurs chargés d’un gros sac.
J’ai besoin de m’arrêter 5 minutes.
Pour souffler et remettre de la crème contre les frottements.
Impossible de faire monter le cardio en montée.

Tout ça m’enlève de l’esprit LA priorité : manger !
Grave erreur qui va me coûter très très cher pour la suite.

Je finis par arriver au refuge Bertone, exténué.
Un dialogue interne négatif s’est instauré, j’en suis conscient.
« Comment supporter ces douleurs jusqu’à l’arrivée ? »
« Comment parvenir à gravir le Grand col Ferret en étant aussi faible ? ».
« J’ai envie de dormir. Finalement, mon corps n’est pas capable de supporter le manque de sommeil ».

Je décide de m’allonger une vingtaine de minutes.
Je mange un peu mais le coeur n’y est pas.
La nausée n’est pas loin.
Le mal est fait !

Je repars à peine mieux.
Je profite quand même un peu de la vue sur les grandes Jorasses.
Mais je ne pense qu’à une chose : rejoindre Arp Nouvaz au Km 100 pour décider de la suite.
Mais quelle souffrance !
J’ai envie de m’allonger sur le bord du chemin mais je continue d’avancer.
Je m’alimente au compte-goutte.

13h20 : je suis enfin à Arp Nouvaz.
Je n’ai pas envie de manger, je me sens trop nauséeux.
Attendre ou abandonner, telle est la question !

A ce moment-là, 2 choses me retiennent :

  • le fait que ce soit l’UTMB
  • le fait que je n’ai pas de réseau pour prévenir ma famille qui m’attend à Champex

Dans d’autres circonstances, j’aurais lâcher.
Mais pas là, pas maintenant, pas après tout ce parcours du combattant réalisé pour être là.

Malgré mon chemin du croix, je reste calme.
Je sais que j’ai énormément d’avance sur les barrières horaires.

Je décide d’aller voir les médecins.
Je leur explique mes soucis.
Je m’applique de la Biafine pour calmer mes irritations.
Surtout, on me propose de prendre un médicament contre les nausées.
Mais cela va mettre du temps à faire effet.
Il va falloir attendre au moins 45 minutes sans boire et sans manger.
Puis y aller très très progressivement.

Je n’ai plus rien à perdre alors je tente et je patiente allongé.
Je mange un peu avant de partir.

Je suis dans l’acceptation de la souffrance, mais jusqu’à quand ?
Je fais des pauses de 5 minutes toutes les 25 minutes dans la montée du Grand Col Ferret.
Je suis soulagé d’enfin passer le col vers 16h21.
Mais j’ai toujours des doutes sur ma capacité à aller au bout.

Grand col Ferret – Champex : Le début de la résurrection

La descente vers la Fouly constitue le point de bascule de mon UTMB 2025.
D’un côté, je ne prends aucun plaisir depuis Courmayeur.
Mes frottements me font souffrir, je me sens à bout de force.
De l’autre, je pense à toutes celles et ceux qui me suivent. A ma famille qui m’attend à Champex.
Au fait que cette course, je ne la ferai peut-être qu’une fois dans ma vie.

Je tente de timides relances mais je suis toujours plus en randonnée rapide.
La Fouly se rapproche peu à peu.
Champex n’est plus si loin, l’espoir renaît !

J’apprécie le ravitaillement de la Fouly où je passe environ 30 minutes.
Le temps n’a plus d’importance j’ai envie de retrouver du plaisir avant tout.
Je mange du riz plusieurs fois puis je sens à nouveau l’envie de vomir.
Allons-y doucement !

Il ne me reste plus qu’une difficulté avant de rejoindre mes proches : la montée à Champex.
Je prends mon temps sur la longue partie roulante qui y mène.
Les frottements me gênent toujours mais je retrouve du plaisir.

Par précaution, je m’arrête pour m’alimenter avant la montée.
Et puis ça y est : je double à nouveau des coureurs !
La forme est revenu juste avant d’attaquer la 2e nuit.

Champex – Chamonix : Le flow

C’est donc en pleine résurrection que je retrouve mes parents et ma femme à Champex.
Je ne m’enflamme pas et je décide de prendre mon temps.
Je m’allonge 20 minutes, je n’arrive pas à dormir mais ça fait du bien !
Je mange en quantité, je change de vêtements, je remets de la crème anti-frottement.
Il se passe près d’une heure !
Mais qu’importe, je vais finir la course je le sais.

Il est 22h45 quand je longe le lac de Champex de nuit.
Je passe du temps à discuter avec un autre coureur Romain, c’est bien sympa.
La montée vers Bovine, que je connais parfaitement, se passe très bien.
La descente vers le col de la Forclaz est aussi l’occasion de discuter avec d’autres coureurs.
Puis je continue ma petite remontée tranquille, sans toutefois prendre de risque, pour arriver à Trient vers 2h30.

Après une petite pause (où je me gave de gaufres Naak), c’est parti pour une des dernières difficultés de cet UTMB.
La montée aux Tseppes et ses forts pourcentages de pente !
Je décide de me faire plaisir et d’accélérer.
Quel plaisir de retrouver de bonne sensations !
La descente sur Vallorcine me paraît quand même interminable.
Mais on touche au but alors on s’accroche sans risquer l’entorse !

Vallorcine : 6h du matin, ça sent la fin ! Je n’ai pas vu cette 2e nuit passer.
Je me lâche sur le saucisson, le fromage, les gaufres.
Tout passe, on en profite !

Allez, un dernier tracas pour la route sinon ça serait trop facile.
Une petite ampoule se forme en arrivant vers le col des Montets.
Mais rien de méchant, un Compeed et c’est réglé.

La courte descente avant d’attaquer la remontée vers la Flégère est assez terrible.
Rocher, racine : il faut y aller tranquille.

9h15 : j’aperçois enfin La Flégère !
Je croise Stéphanie, une traileuse que j’ai eu en stage de trail dans le Beaufortain début mai.
L’occasion de me rappeler à nouveau à quel point mes « exploits » sont suivis.

Il est temps de savourer les derniers instants de la course.
Mon esprit s’évade un peu dans la descente vers Chamonix.
ça y est…je vais enfin finir cette course dont je rêve depuis plus de 6 ans.
Que je regarde à la télévision chaque année.
Je ne pensais pas que ce serait aussi dur après mes expériences de l’UT4M Xtrem et de l’Echappée Belle.
Mais je suis bien sur cette dernière partie.

Les sensations sont tellement bonnes que je mets à peine plus d’une heure entre la Flégère et Chamonix.

L’arrivée à Chamonix est magique.
Ma cousine est venue à ma rencontre à quelques hectomètres de l’arrivée.
Il y a du monde pour m’applaudir.
J’aperçois l’arche d’arrivée, revue maintes et maintes fois à la télévision.
Je tape dans la main de Claude, qui m’a mis 4h dans la vue !
Ma femme et mes parents sont là, autant émus que moi.

Il est 10h28, ce dimanche 31 août 2025.
Je franchis la ligne d’arrivée au bout de 40h et 43 minutes de course.

J’ai réalisé mon rêve de terminer l’Ultra Trail du Mont Blanc.

4 commentaires à propos de “UTMB 2025 : récit d’une course épique”

  1. Contents de lire ce récit !! Tout devient plus concret , tes difficultés , tes déboires Ta gestion de course , ton plaisir ta joie immense !
    Encore bravo

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